En Côte d’Ivoire, le gouvernement rénove les noms de rues pour une meilleure fluidité urbaine et des gains économiques

Le gouvernement ivoirien mène actuellement un grand projet d’adressage visant à décoloniser le nom des rues en Côte d’Ivoire, en particulier dans la capitale économique, Abidjan. Cette initiative, lancée en 2017 et prévue pour se terminer l’an prochain, vise à améliorer la fluidité urbaine et à offrir des avantages économiques tant aux entreprises qu’à l’État.

Dans une première phase, 32 boulevards et 211 avenues d’Abidjan sont concernés. La liste des rues à renommer a été présentée en conseil des ministres et dévoilée le 24 juillet par Bruno Koné, ministre de la construction, du logement et de l’urbanisme. Cette sélection a été effectuée par un collège d’experts et de personnalités du pays afin de garantir une approche impartiale.

Cependant, certains observateurs ont relevé une surreprésentation d’hommes politiques dans la liste, comprenant des présidents, des opposants, des ministres passés et actuels, ainsi que des personnalités qui ont marqué l’histoire politique, militaire, culturelle et sportive de la Côte d’Ivoire. En revanche, des valeurs telles que la solidarité, la liberté et l’hospitalité ont également été prises en compte dans les nouvelles appellations.

Parmi les changements notables, les boulevards auparavant nommés d’après les présidents français Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand seront remplacés par le premier président ivoirien, Félix Houphouët-Boigny, et l’écrivain et homme politique Germain Coffi Gadeau pour l’un, et par la première dame, Dominique Ouattara, pour l’autre.

Ce projet d’adressage, financé à hauteur de 15 millions de dollars par la Banque mondiale, a pour objectif de doter les habitants et les professionnels des treize communes d’Abidjan d’une adresse claire. La ville compte environ 6 millions d’habitants, ce qui rend le défi particulièrement important.

En effectuant des études préliminaires dès 2017, le Bureau national d’études techniques et de développement (BNETD) est responsable de la mise en œuvre du projet. Des enquêteurs ont photographié et référencé chaque maison ou habitation, y compris celles en travaux, pour assurer la réussite de cette entreprise. Selon le ministère de l’urbanisme, plus de la moitié de la capitale économique a déjà été parcourue, et certaines adresses seront opérationnelles avant la fin de l’année.

En plus d’améliorer l’orientation et la circulation des populations au quotidien, cet adressage aura un impact positif sur les services publics, les secours, les entreprises d’e-commerce et de distribution de courrier. Sur le plan économique, il devrait également augmenter l’accès au crédit bancaire, car les banques seront mieux informées sur les emplacements des résidents, réduisant ainsi le risque bancaire.

En outre, ce projet devrait améliorer les recettes fiscales de l’État, car il permettra de mieux identifier les contribuables et de lutter contre la fraude. Actuellement, le taux de recouvrement en Côte d’Ivoire est faible, avoisinant les 15 %, en raison de la fraude fiscale. L’adressage des rues associé au recensement de l’habitat facilitera la collecte de l’impôt et devrait permettre d’augmenter les recettes fiscales.

Certains quartiers précaires risquent d’être délaissés, car ils sont encore mal structurés, situés sur des zones inondables et composés de rues et de maisons anarchiques. Le ministère admet que ces quartiers sont actuellement mis entre parenthèses dans le projet d’adressage. Certains experts, tels que le géographe Gilbert Yassi, spécialiste des services urbains en Afrique subsaharienne, insistent sur l’importance d’accorder une adresse légale à ces quartiers pour éviter de creuser un fossé entre les populations de la même métropole.

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