Moody’s abaisse la note du Cameroun à « À haut risque » en raison de difficultés financières et politiques
Dans une nouvelle évaluation, publiée le 27 juillet dernier, Moody’s Investors Service a décidé d’abaisser la note émettrice en devise et en monnaie locale du Cameroun de B2 à Caa1, plongeant ainsi le pays dans la catégorie « À haut risque », située seulement 4 crans au-dessus du défaut de paiement selon la nomenclature de Moody’s. Bien que la perspective soit qualifiée de « stable », cette décision inquiétante résulte de plusieurs facteurs préoccupants.
L’agence américaine justifie cette dégradation par des tensions de trésorerie auxquelles le gouvernement de Yaoundé fait face. Ces tensions sont notamment liées à l’augmentation des dépenses de sécurité et sociales ainsi qu’à des problèmes de mauvaise gouvernance. Ces éléments ont engendré des retards sur le service de la dette internationale du pays.
Parmi les problèmes de trésorerie relevés par Moody’s, on retrouve les retards de paiements à Deutsche Bank Spain, un créancier privé, dont l’encours est estimé à 20,75 milliards FCFA à fin juin. Ces retards, survenus à la fin de l’année 2022 et en 2023, témoignent des difficultés de liquidités accrues auxquelles fait face le Cameroun. En 2022, le pays a dépensé environ 1,2 milliard de dollars pour subventionner les prix à la pompe, ce qui a considérablement affecté les caisses de l’État et empêché le paiement de certains engagements.
La situation sécuritaire du Cameroun est également pointée du doigt par l’agence de notation. Les conflits armés dans les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et la guerre contre la secte islamiste Boko Haram dans l’Extrême-Nord ont perturbé l’activité économique et créé des pressions financières sur le gouvernement.
Moody’s met également en garde contre le risque d’une crise de succession politique. L’incertitude entourant la succession du président Paul Biya, âgé de 90 ans, à deux ans des prochaines élections présidentielles, suscite des inquiétudes quant à la stabilité politique du pays.
Cette dégradation de la note tombe à un moment inopportun pour le Cameroun, qui prévoyait de réaliser un emprunt en devises de 200 milliards FCFA par placement privé d’ici la fin de l’année. Pour redresser la situation, Moody’s suggère la suppression totale des subventions aux carburants, bien que cela soit difficile compte tenu des pressions sociales importantes que cela pourrait engendrer.
Face à cette situation critique, le gouvernement camerounais devra faire preuve de mesures fortes pour regagner la confiance des investisseurs et garantir une gestion financière saine et transparente afin de sortir de cette période de turbulences économiques et politiques.